Les oliviers et la cueillette des olives (l'olivado)
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Un aïeul pour la planter, un père pour le tailler et toute une descendance pour le récolter
La Provence de mon père, c’est la civilisation de l’olive, rien ne se fait sans elle et sans les herbes de la colline.
Jean Giono
Je rapportais à la maison notre cueillette, qui fit l’admiration de tous.
Mon père en profita pour nous apprendre que l’olive est une "drupe", comme la prune ou la pêche. Ce mot me parut triste et dur, mais je fus charmé par "olivaison", qui nomme la saison des olives.
Marcel Pagnol
"Qui laboure ses oliviers les prie de donner du fruit, qui les fume le demande, qui les taille, l’exige".
Proverbe ancien
L’olivier compte parmi les plus vieux arbres d’Europe. Au détour d’un muret, ses rejets se multiplient, s’enchevêtrent, se soudent, tronc noueux multiforme à la circonférence troublante, magma éternellement renaissant de la terre.
Si la légende veut que la déesse Athéna en ait fait don à la ville d’Athènes, l’olivier a été vraisemblablement introduit en Provence par les Grecs, après la fondation de Marseille, en 600 av. J-C.
L’arbre existerait depuis l’âge de pierre et il se serait répandu au gré des échanges commerciaux. On le signale en Egypte 6 000 ans av. J-C et il existe des témoignages de son exploitation en Crète dès 3 500 ans avant notre ère. Les Grecs puis les Romains se chargent d’étendre sa culture sur le pourtour du Bassin méditerranéen : on utilise l’huile d’olive pour le bain, la cuisine, l’éclairage.
Cette implantation représente aujourd’hui 90% des surfaces d’Olea europea (olivier d’Europe) cultivées dans le monde. Parfois millénaire, il est productif de sept à cent cinquante ans environ. On dit même de lui qu’il est immortel car lorsque le tronc meurt, des rejets repoussent à sa base, prêts à former un nouvel arbre.
L'olivier peut dit-on vivre jusqu'à 5 000 ans ! L’olivier limite son extension à des conditions climatiques spécifiques : altitude de 300 à 800 m, exposition ensoleillée à l’abri des vents et des fortes gelées, températures de 16° à 30°C. Il s’est adapté à des sols pauvres, caillouteux, pentus et secs que les hommes ont retenus par des restanques, les transformant en oliveraies verdoyantes et mythiques.
Sa feuille lisse et brillante aux reflets argentés enchante le paysage. Laissé à l’état naturel, l’olivier peut atteindre 10 à 15 m de haut et de 3 à 5 m lorsqu’il est taillé et cultivé.
Sa récolte est biennale, l’arbre produisant une année du bois et l’autre année des fruits : c’est la taille de l’arbre qui régule sa production. L’huile d’olive est utilisée dans la nourriture, les onguents, le parfum…
La saveur des fruits varie en fonction du terroir et de la date de la cueillette, la tradition voulant que plusieurs variétés soient cultivées dans la même oliveraie. Les olives des Baronnies, l’aglandau et la verdale, sont pressées pour l’huile ; l’olive des Nyons, ou tanche, est récoltée dans la Drôme et le nord du Vaucluse ; l’olive des la Vallée des Baux est communément appelée grossanne noire ou verte et l’olive de Salon, la salonenque ; l’olive de Nice, la cailletier petite et noire ainsi que la principale variété, la picholine verte fine et allongée, sont un véritable délice. Certaines sont cueillies tournantes, lorsque leur robe verte devient juste violette.
Si l'olive fait partie intégrante de la gastronomie méditerranéenne, il faut aussi rappeler que le fruit, les feuilles et l'huile présentent également des bénéfices pour la santé. L'olive est un antioxydant, riche en vitamines A et E, qui contient des polyphénols ainsi qu'une grande variété d'éléments minéraux dont le calcium et le potassium.
Participant aux effets positifs du régime crétois, les huiles d'olive ont une valeur universellement reconnue, puisqu'il est désormais admis que leur usage peut contribuer à abaisser le taux de cholestérol et participe à la diminution des risques et troubles nerveux et de maladies circulatoires.
L'OLIVAISON
Dès septembre, on cueille les olives vertes ou olives cassées, mais la pleine saison de la récolte se déroule lorsque l’huile est dans l’olive, c’est-à-dire à partir de la Sainte-Catherine au mois de novembre. Il existe un dicton qui dit ": "Pour sainte-Catherine l'huile est dans l'olive".
La récolte est réalisée essentiellement à la main et une seule personne peut cueillir jusqu’à 60 kg d’olives par jour, il faut 5 kg à 6 kg d’olives pour faire 1 litre d’huile (selon les qualités des olives).
Riondet en 1894 écrit dans un article : "La cueillette des olives est un grand travail, qui donne de l’occupation aux femmes et aux enfants pendant une partie de l’hiver, je l’ai vu se prolonger quelques fois pendant cinq ou six mois, depuis le mois d’octobre jusqu’au mois de mars".
Cette affirmation est bien réelle puisque les oliveraies sont nombreuses et possèdent un grand nombre d’oliviers de forte taille, portant beaucoup de fruits. De plus, à la lecture des registres d’appel journaliers des écoles communales, on constate que pendant cette période hivernale de nombreux élèves sont portés absents avec la mention "aux olives".
On distingue trois modes de cueillettes des olives. On attend pour cueillir les olives qu’elles tombent naturellement de l’arbre, et comme cela n’arrive que peu à peu, on est obligé de revenir souvent sous le même arbre. Ou bien, lorsque les olives sont parvenues à une maturité suffisante, après avoir cueilli une ou deux fois celles qui sont tombées, on abat à grands coups de gaules celles qui sont encore sur les arbres.
Enfin, on peut cueillir les olives à la main dans des corbeilles pendues devant soi ou ce qui est plus facile encore, les faire tomber à la main dans de grands draps étendus à terre. Pour atteindre les branches situées en hauteur, on utilise un chevalet ou un escalasson (ou encore escarasson). "
Au début de la récolte, les olives laisseront plus difficilement échapper l’huile qu’elles contiennent, celles-ci sera plus fruitée ou plus verte, à la fin au contraire, et alors que les olives seront plus mûres, la fabrication sera plus facile, les huiles seront plus neutres et plus jaunes, mais dans les deux cas il ne faut pas d’exagération, il ne faut pas récolter les olives presque vertes car on obtiendrait des huiles âcres, fortes et en petites quantités, ni des fruits trop mûrs car on ne gagnerait pas en quantité et on y perdrait en qualité.
Il ne faut pas oublier que les grands froids du mois de janvier peuvent porter atteinte à la production et qu’alors il y a intérêt à faire la cueillette dès que la maturité des fruits commence à se dessiner. Les olives sont d’ordinaire placées dans des sacs de jute mais il vaut mieux les mettre dans des caisses ou des corbeilles pour éviter les meurtrissures qui sont la cause de mauvaises fermentations".
Source : Provence et Méditerranée – Mille visages de la France –